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Rencontre avec le président de Coca-Cola France

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Hier soir, Christian Polge, président de Coca-Cola France, participait à un dîner-débat organisé par l’UAM 93 (Union des associations musulmanes de la Seine-Saint-Denis). Convié, nous avons accepté l’invitation.

Rencontre avec le président de Coca-Cola France
Dîner-débat avec le président de Coca-Cola France, Christian Polge

Coca-Cola invité par l’UAM-93

Avant d’en venir à ce qui nous intéresse, à savoir l’épisode « Coca-Cola et l’alcool » qui depuis juillet 2007 agite ça et là, commençons par quelques mots sur la soirée elle-même. Le dîner a eu lieu dans une salle de réception de Drancy (93) en présence de Christian Polge, venu seul, et d’une cinquantaine de représentants associatifs et d’entrepreneurs musulmans. Christian Polge a été le premier à prendre la parole. Après un historique de la société, nous avons eu droit à un laïus, somme toute prévisible, sur la diversité, ses vertus et ses espoirs, et sur les valeurs universelles défendues par Coca-Cola. Un discours lisse, sans aspérité, très politiquement correct et très tendance, puisque teinté de ce multiculturalisme qui traverse aujourd’hui la société française.

Mohamed Henniche, un des responsables de l’UAM-93, a ensuite pris la parole pour présenter rapidement cette association, sa vocation, ses actions. Puis il enchaîna sur la raison pour laquelle Christian Polge était là ce soir, pourquoi il a été invité. La réponse, en forme de boutade, fut : et pourquoi pas ? S’en est suivi alors une série d’interventions, dont la nôtre, puis des questions-réponses qui ont ponctué tout le repas. Il faut ici saluer le courage de Christian Polge. S’il ne venait pas en terrain ennemi, ses hôtes étaient loin d’être acquis à la cause de Coca-Cola – même s’il est apparu que tous les points de vue à propos de Coca-cola, même les plus contradictoires, étaient représentés dans l’assemblée. Il y avait, pourrait-on dire, sans mauvais de jeu de mots, de l’eau dans le gaz : alcool ou non dans le Coca-Cola, boycott de Coca-Cola, ambiguïté avérée ou prétendue de Coca-Cola à l’égard de la Palestine, etc. La venue de Christian Polge n’allait pas de soi. L’exercice ne s’annonçait pas facile – et ne l’a pas été. Malgré tout, il est venu et il s’est prêté aux questions souvent sans complaisance, parfois énergiques, toujours franches, mais évidemment respectueuses. Rien ne l’obligeait à accepter cette invitation. Il l’a fait. Qu’il en soit une nouvelle fois remercié.

Quand Coca-Cola s’explique… ou presque

Venons-en maintenant à ce qui a motivé notre participation à ce dîner : la gestion par Coca-Cola de l’épisode « Alcool dans les boissons Coca-Cola » après la publication d’un premier article en juillet 2007. Rappelons les faits :

1- Nous publions un article le 14 juillet 2007 – avec quelques maladresses, il faut bien le reconnaître aujourd’hui – intitulé non sans une touche de provocation « Adieu Coca, Fanta, Sprite et autres boissons alcoolisées ».

2- Quelques jours plus tard, suite au buzz suscité par l’article, Coca-Cola change la FAQ de son site et commet une boulette : le service communication reprendra mot pour mot le commentaire d’un lecteur (3abde raouf) qui nous portait la contradiction. Nous consacrerons alors un second article à ce sujet : Alcool et Coca-Cola : pourquoi le service de communication a-t-il modifié la FAQ ?.

3- Coca-Cola, embêté, cherche à éteindre la polémique et tordre le cou à ce buzz qui n’en finit pas. En 2008, la mosquée de Paris délivre un certificat attestant que le Coca-Cola est bien halal : La mosquée de Paris certifie que Coca-Cola est halal.

Évacuons immédiatement la question du caractère halal de Coca-Cola. Coca-Cola est bien halal et les quantités infimes d’alcool qu’il contient n’a aucune incidence sur son caractère halal (lire tout de même ceci : Coca, l’alcool et le halal, 20 ans déjà). Evacuons ce problème, comme nous l’avons évacué hier soir, pour nous intéresser à une question précise, celle posée à Christian Polge : Comment expliquer le méli-mélo – et on ne dira pas fiasco, car cela ce serait excessif – qui a suivi la publication du premier article en juillet 2007 ? Il est assez surprenant de prime abord qu’une entreprise aussi rompue aux gestions de crise et qui a une maîtrise de la communication comme peu d’entreprises l’ont ait pu gérer cet incident aussi maladroitement. Nous avons donc voulu comprendre et avons posé la question au président de Coca-cola France, après avoir dressé comme ci-avant un rapide historique.

La réponse du président de Coca-Cola a été poussive et gênée : Coca-Cola a travaillé « au fur et à mesure » pour gérer cette situation, nous a-t-il dit. Et il « espère que la polémique est terminée ». Question suivante. Notre question fut expédiée en trente secondes, sans qu’une réponse ne soit apportée. Mais c’était sans compter l’animateur du débat, Rachid Gacem, qui eut l’heureuse idée de relancer Christian Polge une première, puis une seconde fois (la première relance ayant abouti à une autre non-réponse). Mal à l’aise, M. Polge nous expliqua alors que Coca-Cola a une approche globale et qu’il n’est pas possible d’être à l’écoute de tous les consommateurs. Dont acte. Et d’ajouter qu’il y a dix ans à Marseille des dépliants publicitaires de Coca avaient été écrits en arabe. L’opération n’a pas fonctionné. « Ça a été repoussé », nous a-t-il précisé. Mais peut-être en serait-il autrement aujourd’hui, selon lui.

Coca-Cola ne connaît pas les consommateurs musulmans

La (non-)réponse de Christian Polge est en fait normale. Elle est venue confirmer ce que nous devinions et ce dont nous sommes intimement convaincu : Coca-Cola, comme l’écrasante majorité des entreprises qui s’intéressent de près ou de loin aux consommateurs musulmans, ne les connaissent pas. Elles les désirent, elles veulent les séduire, mais elles ne savent pas qui ils sont. L’exemple de ces dépliants en arabe qui ont fait un flop est à cet égard un aveu criant : les musulmans de France sont de bons petits Français et ne veulent pas qu’on leur parle en arabe, mais qu’on leur propose des produits qui respectent le halal. Coca-Cola s’est autant emmêlé les pinceaux suite à l’article sur Coca et l’alcool, car Coca-Cola n’a aucune idée des mécanismes qui opèrent chez les consommateurs musulmans de France. Et ce n’est pas faute d’avoir essayé. Rappelons qu’aujourd’hui encore la FAQ du site de Coca-Cola France comporte deux questions dédiées aux musulmans, deux sur douze.

Si Christian Polge n’a pas su ou pas pu expliquer ce qui s’est passé, c’est parce que lui comme d’autres ne mesurent pas la révolution sociologique et silencieuse qui s’opère depuis plusieurs années en France, celle des musulmans de France, qui aujourd’hui constituent un marché très important et même un puissant relai de croissance, déjà incontournable. Tous ces acteurs économiques ne la mesurent pas, parce qu’ils ne l’ont pas vu arriver et pour certains n’en ont même pas conscience. De fait, ils ne s’y sont pas préparés et ne savent toujours pas pour nombre d’entre eux comment s’adresser à cette nouvelle population de consommateurs au fort pouvoir d’achat. Gageons tout de même qu’ils sauront prendre les dispositions nécessaires pour enfin se prévaloir d’une expertise qui leur fait aujourd’hui défaut et qui les empêchent de conquérir des parts de marché, pourtant si faciles à conquérir.

Ironie du sort, eux qui hier avaient établi un plafond de verre qui empêche l’accès à des postes à responsabilité à des gens issus « de la diversité » se heurtent aujourd’hui à un plancher de verre qui rend très difficile la pénétration du marché des consommateurs musulmans, véritable eldorado s’il en est.

Discrimination et islamophobie

Le syndicat des patrons musulmans, le SPMF (Synergie des professionnels musulmans de France) était présent au dîner en la personne de son président, Habib Djedjik, lequel a interpellé Christian Polge sur ce fameux plafond de verre qui fait qu’aujourd’hui que les places à responsabilité ne sont pas octroyées aux Français d’origine en général et aux musulmans en particulier. Chacun s’attendait sinon à une réponse sur la politique de ressources humaines et de recrutement de Coca-Cola, tout au moins à une réponse passe-partout. Non en lieu et place, nous avons eu droit à… un appel lancé aux entrepreneurs du SPMF à se lancer dans le recyclage des bouteilles en plastique. C’était pour le moins surprenant.
Sur la question de l’islamophobie, autre point soulevé par Habib Djedjik, M. Polge a affirmé ne pas la ressentir. Et d’ajouter que l’ouverture à l’autre, à celui qui est différent, est toujours difficile et qu’effectivement il est toujours plus confortable de rester entre soi.

Pour en savoir plus sur le SPMF, lire SPMF : premier syndicat des professionnels musulmans de France

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1 COMMENTAIRE

  1. MashaAllah, votre article est vraiment excellent !

    J’ignore si l’expression « plancher de verre » est de vous, par contre l’image est puissante !
    Oui consommateurs musulmans, nous avons un pouvoir face à ce type de structure ! ! !

  2. as-salâmu ‘alaykum

    Yussef > Rien de neuf. Il a expliqué que Coca-Cola était une entreprise, rappelait que le chairman de Coca est un Turc et que Coca a des usines (deux ou trois, je ne sais plus) en Palestine.

    Jouhayna > wafîk bâraka-Llâh

    Green Islam > oui, la formule est de moi.

  3. « rappelait que le chairman de Coca est un Turc »…

    mouis entre nous ça veut pas dire ça et puis ce n’est pas un atout ou un argument en soi ! (parole de Turque !)

  4. as-salâmu ‘alaykum

    512banque, rien de croustillant sur le boycott pendant le dîner. Deux interventions sortaient du lot (celle d’un prof d’université et celle d’un avocat). Il devrait y avoir une vidéo, si j’ai bien compris.

    La maman d’Ismael, Oasis, eau, Badoit, mais pas de Coca.

  5. ET LE BOYCOTT!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
    RIEN SUR LE BOYCOTT!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

    vous boycottez aussi le boycott? (ironie)

    salam alaikom

  6. assalam,

    Je ne comprends pas bien cette attente sur le boycott. Qu’aurait dû répondre le patron de Coca en Fr ?
    « Nous avons perdu x millions avec le boycott, alors on va ouvrir des usines ailleurs », à mon avis il pourrait aussi bien se tirer une balle dans le pied directement. Quelles réponses réalistes espérer à ce sujet ?

  7. As salâmou alaykoum,
    Talib,j’ai regardé les photos et j’ai vu quelques beaux barbus.mais,franchement,la vue de ces photos m’a inspiré une réflexion:quelle perte de temps que ce combat puis ces explications avec Coca:halal ou non,si une personne a un doute,qu’elle s’abstienne;il existe des ersatz de cette boisson,qui n’est pas vitale en soi pour quiconque,musulmans comme non musulmans,

  8. Vos insinuation que cette communauté est « pourtant si faciles à conquérir » ensuite vous dite du « marché des consommateurs musulmans, [un] véritable eldorado »..Me laisse penser et je pense que même votre invité l’a compris, qu’il faut vous engager, rédacteur de cet article, pour assurer cette tache..

    Si vous arriviez à prouver, un jour, que coca contient autre choses que ce qui est indiqué comme ingrédients, vous deviendrais riche sans même chercher à aider coca à percer le marché de la communauté musulmane « pourtant si faciles à conquérir ».

  9. Asalam’alaikom,

    La remarque est un peu stupide:

    « Constat suite aux visionnement rapide des photos :

    – Manque de barbes (ou augmentation des imberbes chez les musulmans)
    – Manque de hidjab (au moins un, si possible ?) »

    Plutôt que de critiquer celles et ceux qui se sont déplacé et qui donc ce sont senti concerner, il aurait été plus judicieux que ceux qui ont du poil sous le menton se déplacent également. Si t’en vois pas, c’est qu’ils n’ont pas voulu venir ou s’en fiche peut-être

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