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Palestine : le keffieh, symbole d’identité et d’enracinement

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Dans article intitulé « Le Keffieh, l’autre drapeau palestinien », l’historien et spécialiste du Moyen-Orient Jean-Pierre Filiu raconte ce bout de tissu noir et blanc devenu symbole de lutte, de résistance et, bien plus, d’enracinement du peuple palestinien sur sa terre. Extrait.

« C’est l’incroyable histoire d’un rectangle d’étoffe, traditionnellement porté par les paysans de Palestine, depuis les montagnes de Galilée jusqu’aux oasis de Gaza et au désert du Néguev.

Un foulard noué autour de la tête, voire du visage, pour protéger les plus humbles du soleil et du vent, de la pluie et du froid, du sable et de l’humidité. C’est l’histoire du keffieh qui, même s’il se retrouve de l’autre côté du Jourdain, en Syrie et en Irak, en est venu à symboliser une forme d’identité palestinienne.

Nous sommes en 1936. Cela fait deux décennies que la Grande-Bretagne s’est engagée auprès du mouvement sioniste, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Arthur Balfour, à “favoriser l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple juif”. Cela fait une quinzaine d’années que Londres a intégré cette “déclaration Balfour” au mandat que la Société des nations lui a attribué sur l’ancien territoire ottoman de Palestine, malgré les protestations des notables palestiniens et leur refus de cautionner un tel mandat. Cela fait quelques années que l’immigration juive, du fait de la prise du pouvoir par Hitler à Berlin, est devenue massive en Palestine, accentuant en retour la mobilisation de la population arabe contre sa dépossession.

C’est en 1936, donc, qu’éclate la “grande révolte arabe” de Palestine, telle qu’elle est désignée dans l’historiographie occidentale, alors même que cette thawra, sa dénomination arabe, est bel et bien une “révolution”. Ce n’est ni la première ni la dernière fois que les Arabes sont réduits par cette manipulation linguistique à n’être que des rebelles, incapables de mener une authentique révolution. La grève générale qui paralyse durant six mois la Palestine mandataire participe pourtant d’une dynamique révolutionnaire, que le Royaume-Uni s’acharne à briser. L’étouffement du mouvement pacifiste laisse le champ libre à une insurrection armée qui, partie des campagnes palestiniennes, parvient, en 1938, à prendre pied dans la vieille ville de Jérusalem.

Les insurgés arborent le keffieh, non seulement pour masquer leur identité, mais aussi pour affirmer l’enracinement du paysan palestinien sur sa terre, dont l’arbitraire britannique et la colonisation sioniste cherchent à le déraciner. La montée en puissance de la guérilla contraint les élites urbaines, impuissantes à enrayer le cycle de la dépossession, à reprendre à leur compte ce symbole vestimentaire. C’en est fini du chapeau occidental ou du tarbouche ottoman, comme le signale le consul général de France à Jérusalem : “La coiffure de tout patriote conscient doit dorénavant être celle des Bédouins, chère au colonel Lawrence, le koufié (sic).” Que le distingué diplomate en soit réduit à invoquer Lawrence, dit “d’Arabie”, en dit long sur son désarroi face à l’irruption du keffieh chez les élites hiérosolymitaines.

Un tel keffieh, à motifs noirs sur fond blanc, est dès lors identifié à la résistance palestinienne, même après l’écrasement, en 1939, de la “grande révolte arabe », face à laquelle Londres a enrôlé des vétérans de la contre-insurrection irlandaise et des milliers de miliciens sionistes. »

Pour lire l’intégralité de l’article de Jean-Pierre Filiu, il vous faut vous procurer ou consulter l’ouvrage paru en mars dernier, dans lequel il figure : Ce que la Palestine apporte au monde, éditions du Seuil, Paris, 2023, 25 euros.

Ce que la Palestine apporte au monde

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